Analysis of Pan
Henri de Regnier 1864 (Honfleur) – 1936 (Paris)
C’était au temps
Où les grands Dieux de marbre et d’or
Ne vivaient plus qu’en leurs statues ;
On les voyait encor,
Debout et nues,
Au seuil des temples clairs
A tuiles d’or,
Avec la mer
Derrière eux, éclatante, innombrable et sereine,
A l’horizon...
C’est ainsi que je les ai vus, étant petit,
Figures vaines
Dont on m’apprit,
Sans doute en riant d’eux, les formes et les noms ;
Et je riais, enfant, à les voir et de voir
Celui-là, le plus grand, dont l’ombre, vers le soir,
S’allongeait à ses pieds, lourde et grave,
Parce que sa statue était faite d’airain :
C’était le Maître Souverain,
Que nul ne brave,
Zeus !
Et comme, ainsi que je l’ai dit,
Son ombre était énorme et moi petit,
Je m’asseyais dans sa fraîcheur déjà nocturne
Et je jouais avec des pierres, une à une,
Mais l’aigle courroucé qui veillait près de lui
Me regardait et j’avais peur, étant petit.
Et c’est ainsi que j’ai connu lui et les autres.
Apollon
Avec sa lyre ; Hermès, les ailes aux talons
Et deux ailes de même encore à son pétase ;
Mars qui brandit le glaive ; et, nu, la barbe rase,
Le torse blanc, la chair heureuse et dans sa main
Portant le thyrse double et la pomme de pin,
Bacchus qui, couronné de pampre et toujours beau,
A sa tempe sans ride assure son bandeau,
Et Neptune barbu d’algues et dont l’oreille
Compare dans le vent qui l’apporte pareille
La rumeur de la mer à celle des forêts ;
Et les Déesses et Cypris au rire frais
Dont fleurissent les seins et dont mûrit la bouche,
Et la grande Junon, sérieuse et farouche,
Et Diane hautaine et farouche comme elle,
Et Minerve casquée et l’antique Cybèle,
Tous ceux que l’univers honora d’âge en âge...
Mais tous n’étaient plus rien que de vaines images,
Et, qu’ils fussent sculptés dans le marbre ou dans l’or,
La figure des Dieux survivait aux Dieux morts.
Cependant l’étendue agreste de la terre
N’était point tout à fait encore solitaire.
Des êtres fabuleux et à demi divins
Se cachaient dans les bois et hantaient les ravins,
Fuyant l’homme et craignant sa ruse et son danger.
Dans un monde nouveau maintenant étrangers,
Ils épiaient les voix, les bruits, les pas : Centaures,
Dans la gorge des monts hennissant à l’aurore
Et qui, le soir, boiteux et lointains, du galop
De leur fuite inégale inquiétaient l’écho ;
Faunes roux habitant les grottes et Satyres
Rôdant d’un pied furtif près des ruches à cire,
Tritons de qui la conque offusquait l’air marin,
Fausse et rauque parfois à leur souffle incertain ;
Des Dryades souffraient sous l’écorce des chênes ;
Des Nymphes étaient l’onde encore des fontaines,
Et, parfois, l’on voyait, dit-on, au crépuscule
A cette heure indistincte où la vue est crédule,
Errer un grand Cheval, au pas effarouché,
Qui, de loin et d’un bond, sans qu’on pût l’approcher,
S’envolait en ouvrant ses deux ailes de flamme !
On racontait cela, il m’en souvient,
A la veillée,
Auprès du feu ;
Les femmes
Riaient quand on parlait du Satyre et du Faune,
Et j’écoutais de mes oreilles émerveillées.
C’était l’automne,
Et l’on se ressemblait, déjà, autour du feu
Où nous jetions
Des feuilles sèches et des pommes
De pin
Dans les tisons
A pleines mains...
Il y avait aussi quelqu’un d’autre
Dont on parlait souvent :
C’était avant
Qu’une voix, le long de la côte,
Eût couru sur la mer en criant
Qu’il était mort.
C’était au temps
Où le Dieu Pan
Vivait encor...
Il était invisible et présent dans les choses,
Mystérieux, informe, innombrable et sacré,
Et le printemps naissait avec toutes ses roses
De l’air fécond soudain qu’il avait respiré ;
C’est lui qui, de la terre, en épis ou en paille,
Faisait pousser le blé et grandir la moisson,
Et qui, roi des troupeaux que l’étable embercaille,
Leur fait croître la corne et friser la toison ;
C’est lui qui surveillait la vendange et la cueille,
Conduisait la charrue et guidait le labour,
Et qui, dans les vergers, abrite sous la feuille
Le fruit qui, mûr enfin, sera graine à son tour ;
Les eaux, où sourdement s’abreuvent les semences,
Ainsi que le soleil, la nuée et le vent
Et l’ombre qui finit et la nuit qui commence
Et l’aurore et le soir, sont à lui qui est Pan.
Et, tandis que les dieux ont quitté leurs statues,
Lui seul est demeuré quand les autres sont morts,
Et sa forme multiple, éparse et jamais vue
Subsiste universelle et vit partout encor.
Mon père,
Homme pieux,
Savait ces choses,
Les ayant apprises du sien,
Vieillard
V
Scheme | Abcbaabbdd eaeabbfddfx eeddge adxaxddheggiajjxxxxba bbaabaabxhabddiagxjbx eefadidfaadax bexeexAdb abxb xdgd gbgb axxd caxb baadee |
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Poetic Form | |
Metre | 1111 11111111 111111 1111 111 111101 011 111 1111111 01 1111111110 101 111 1111111111 111111111 1101111101 111111 1111111 110111 1111 1 1111111 11111110 111111111 11111111 1111111110 11111110 11111110111 1 1111111110 1111111111 1110111111 0111111111 1011011111 101111111 0110110111 11011111 01101111 1111111111 11110110111 1111111111 11111111 10111111 11111110 11110101111 111111111100 11111101111 110111111 11111110 11111101 1111101 111111111 1111111110 111111 111111111 1111111 110111111 111011111 1111111 1111111111 111111110 11111011 111111111 1111111 111111111 01111110111 1111111 11111111111 11111111 1110111 0111 1111 11 111111111 11111111 111 111111111 111 1111111 11 111 011 111111 1111 1101 11011111 11111111 111 1111 1011 11 110100111111 111111 1010111110 11111111 1101111011111 11011111 1111111101 1111111111 1101111111 1111101 111111111 01111110111 1111111 11001111101 1111111101 111011101011 111111111 10101111111 1111001111 111111 111 11 111 11111 1 1 |
Closest metre | Iambic hexameter |
Characters | 4,446 |
Words | 760 |
Sentences | 16 |
Stanzas | 13 |
Stanza Lengths | 10, 11, 6, 21, 21, 13, 9, 4, 4, 4, 4, 4, 6 |
Lines Amount | 117 |
Letters per line (avg) | 28 |
Words per line (avg) | 7 |
Letters per stanza (avg) | 252 |
Words per stanza (avg) | 60 |
Font size:
Submitted on May 13, 2011
Modified on March 05, 2023
- 3:48 min read
- 45 Views
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Style:MLAChicagoAPA
"Pan" Poetry.com. STANDS4 LLC, 2024. Web. 29 May 2024. <https://www.poetry.com/poem-analysis/17224/pan>.
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